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EUGEN DREWERMANN (né en 1940) 
Il aurait pu couler des jours tranquilles, entouré de ses paroissiens, si, pour mieux délivrer leur âme, il ne s'était pas pris de passion pour la psychanalyse. Sa thèse sur les structures du mal lui ouvre en 1977 la chaire de théologie et d'histoire des religions au séminaire universitaire de Paterborn (Westphalie). Mais la rencontre de l'autel et du divan n'est pas sans danger, d'autant que Drewermann ne s'arrête pas à la critique globale du fait religieux. Dans "Psychanalyse et théologie morale" (1984), il passe l'Eglise de Rome au crible de l'analyse, et démonte de l'intérieur des mécanismes d'aliénation dominés par le surmoi et la peur. Critiqué par ses supérieurs, il persiste avec "Fonctionnaires de Dieu" (1989 1993), destiné à un plus large public. La vocation du prêtre y est assimilée à un phénomène de compensation sécuritaire, son sacerdoce à "l'abdiquation de la réalité personnelle au profit de l'organisation du surnaturel". Les sanctions tombent sans tarder : Drewermann est interdit d'enseignement, de prêche puis de sacerdoce. Porté par les médias et des millions de lecteurs, ce "nouveau Luther" poursuit sa croisade. Il multiplie les critiques envers le Vatican, accusé au fil de ses nombreux ouvrages d'ignorer le rôle de la femme, de diaboliser la sexualité, ou d'être responsable du saccage de la nature. Parallèlement, il milite pour un christianisme thérapeuthique libéré du dogme et, fidèle à son engagement, refuse de quitter l'Eglise... tout en conseillant au Pape d'abandonner sa fonction ! Cette position intenable a connu son terme en décembre 2005. Eugen Drewermann s'est séparé de l'Eglise catholique.
Ce texte a été publié dans Le siècle rebelle, dictionnaire de la contestation au XXè siècle, éd. Larousse, 1999.