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La nature aurait-elle programmé l’être humain pour l’amour ? On pourrait le croire au vu des dernières découvertes en neurobiologie, qui nous révèlent une stratégie très subtile. 

Le premier contact amoureux se passe à notre insu. Un dialogue muet, subliminal, s’instaure à distance entre les deux futurs partenaires grâce aux phéromones, composés volatils chargés d’informations qui s'échappent de glandes situées sous les aisselles, autour des organes génitaux et des mamelons. Ces substances viennent frapper nos narines sans que nous les sentions, mais leur efficacité est garantie : l'organe "voméronasal" chargé de les capter dans le nez est directement relié à l'hypothalamus et au bulbe rachidien, notre cerveau le plus archaïque hérité des reptiles. Les informations qu’elles véhiculent sont souvent de l’ordre de la séduction. On a ainsi constaté qu’elles augmentaient le désir des hommes en présence d'une femme en période de fécondité, et qu’elles servaient à sélectionner instinctivement le partenaire à l'identité génétique appropriée (1). 
Ce premier message transmis, d’autres sens et fonctions vont entrer en jeu, faisant appel à notre système limbique, siège des émotions et héritage des petits mammifères. L’attraction inconsciente va pouvoir se transformer en coup de foudre. Il suffira d’un regard, d’un sourire, pour réveiller une impression de plaisir enfouie dans notre mémoire affective la plus ancienne. Une décharge d’adrénaline réactive les fonctions de notre cerveau, suivie presque immédiatement par une diffusion de phényléthylamine (ou PEA). Produite dans le septum, au cœur du système limbique, cette hormone déclenche une intense sensation de plaisir. Un bonheur qui donne des ailes, accompagné de quelques troubles : rythme cardiaque accéléré, rougeur, sensation de chaleur ou de froid. Mais la PEA responsable du coup de foudre agit aussi comme une drogue, elle provoque un état d’euphorie qu'il faut sans cesse réactiver : on a besoin de voir l’être aimé, de contempler sa photo, de l’entendre au téléphone plusieurs fois par jour. L’euphorie ne dure guère, car lorsqu’une hormone est libérée en abondance, les récepteurs neuronaux finissent par perdre leur aptitude à répondre. Le simple fait de vivre avec l’être aimé détruit progressivement les charmes du coup de foudre. Un don Juan, "accroc" à la PEA, s’enfuira bientôt.
Pour que l’histoire se poursuive, expliquent les biologistes (2), il faut générer d’autres sources de plaisir : voyages en commun, naissance d’un enfant, achat d’une maison… vont permettre à d’autres hormones de renforcer le lien. Le bonheur de vivre ensemble déclenche une production de dopamine. Cette hormone spécifique du plaisir va s'allier à deux autres, produites par l'hypophyse, l'ocytocyne et la vasopressine, en un jeu croisé capable de mener au paroxysme de l'orgasme comme à la plus éthérée des félicités. L'ocytocyne, par exemple, projetée massivement dans l'organisme lors du premier rapport amoureux, est également responsable des contractions pendant l'accouchement et de l'expression du lait durant l'allaitement. C’est l’hormone du premier attachement, de la première empreinte, son taux augmente dans l'organisme lorsque, face à un inconnu, on se sent en confiance (3). Elle nous lie donc affectivement à l’aimé comme nous l’avons été à notre mère.
Avec le temps, l’accoutumance neuronale entraîne inévitablement une baisse de dopamine et par conséquent du plaisir intense d’être ensemble. Mais dans un couple qui a su maintenir le lien, ce manque n’est plus une souffrance car la sérotonine, hormone du sommeil et de la régulation de l’humeur, va entrer en jeu pour apaiser et adoucir la relation amoureuse. La place est faite pour que l'excitation sexuelle devienne un véritable amour, ou comme l'appellent les neurobiologistes, un "attachement".

(1) Martha McClintock, Nature, mars 1998, Claus Wedekind, Behavioural Ecology, 2001
(2) Aussi bien Marc Schwob ("La Biologie de l’amour", Hachette) que Jean-Didier Vincent ("Biologie des passions", Odile Jacob)
(3) Claude Zack, Université Claremont, 2003

                                                                                     Un article pour Psychologies Magazine

 

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