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Introduction
Un entretien avec Jon Kabat-Zinn

Des effets prouvés par la science
Qu’en pensent les médecins français ?

Introduction

La méditation permet de lutter contre la rechute dépressive, le stress et toutes les maladies qui lui sont liées. Il aura fallu trente ans pour que cette certitude, venue des Etats-Unis, se diffuse à travers l’Europe : en Allemagne, en Belgique, en Angleterre… Et en France ? Seule une trentaine de psychologues et de médecins – dont Christophe André, à l’hôpital St Anne à Paris, et David Servan-Schreiber – s’efforcent aujourd’hui de promouvoir la méditation.* Mais face à eux, les réticences sont fortes et nombreuses : formation médicale faisant peu de place au pouvoir de l’esprit, peur de l’aspect religieux et du risque sectaire, influence de la psychanalyse qui regarde d’un mauvais œil toute forme de comportementalisme…
Quoi de plus sensé, pourtant, que de s’attaquer aux méfaits du stress en s’entraînant au calme de l’esprit ? C’est ce que propose depuis 1979 le biologiste Jon Kabat-Zinn outre-Atlantique (lire notre entretien p. XX). Au sein de sa clinique, il utilise une série d’exercices de méditation, de respiration, et d’entraînement de l’attention, dans le cadre de la « réduction du stress basée sur la pleine conscience », ou MBSR. Thérapie cognitive fondée sur le même principe, la MBCT ajoute à ces exercices un travail sur la prise de conscience du moment où peu à peu la dépression s’installe (rumination d’idées noires, dépréciation de soi…), et un entraînement progressif à contrôler ces processus mentaux en douceur – à lâcher prise : accepter sans juger, et laisser passer émotions et pensées « comme des nuages dans le ciel ».

N’était-ce pas ce que nous attendions tous : le retour de la psychologie au cœur de la médecine, et la réconciliation du corps et de l’esprit ? La France tarde pourtant à s’en convaincre : la méditation bouscule trop les dogmes, pour les patients comme pour les thérapeutes. Comment faire changer cet état de fait d’autant plus aberrant que les résultats sont là, confirmés par la science (voir page xxx) et par les témoignages de patients (voir page XX) ? Cela dépend de tous : des médecins, du gouvernement, des médias, mais également de chacun de nous. Commencer par découvrir en profondeur cette technique et l’appliquer, en prévention, au quotidien (lire p. XXX), c’est non seulement « bon » pour la reconnaissance des bienfaits de la méditation mais aussi – et d’abord - pour notre santé physique et psychique.

Un entretien avec Jon Kabat-Zinn

Des effets prouvés par la science

• Une étude anglo-canadienne menée en 2000 a montré que le programme MBCT (thérapie cognitive par la pleine conscience) réduisait de moitié le risque de rechute dépressive.(1)

• La MBSR, réduction du stress basée sur la pleine conscience, a été l’objet d’innombrables études. Elle s’est révélée  efficace contre l’anxiété (2) et les douleurs chroniques (3) (disparition ou diminution de moitié au moins des symptômes), mais aussi pour rendre, deux fois mieux qu’un groupe de discussion, de jeunes délinquants sociables et capables de concentration (4) – c’est dire l’étendue de ses bienfaits. Elle constitue surtout un formidable additif à une thérapie « classique », qu’il s’agisse de cancer (5), de troubles gastriques et intestinaux ou même de fibromyalgie (6) ou du sida (7), en augmentant considérablement le bien-être (sommeil, douleur, humeur, capacité à faire face, implication dans la thérapie), les défenses immunitaires  et les effets du traitement.
Une méta-analyse canadienne menée en 2002 (8) a relevé quelques faiblesses méthodologiques dans ces études (petitesse des échantillons, faiblesse des protocoles), mais elles n’empêchaient pas l’auteur de signaler que la méthode semblait efficace.
L’une des recherches les plus spectaculaires concerne un programme de méditation adapté aux malades souffrant de psoriasis, pratiqué quelques minutes par jour pendant leur traitement par rayons ultraviolets (9). Par rapport à un groupe de patients n’ayant bénéficié que du traitement, les patients méditants ont guéri en moyenne quatre fois plus vite ! Un tel succès ne peut pas s’expliquer par un effet placebo qui serait dû au soutien social - puisque le patient vient seulement à l’hôpital pour sa séance d’UV et repart aussitôt, ou bien à l’influence de l’instructeur –puisque celui-ci n’est pas visible; le patient n’entend qu’une voix inconnue enregistrée…

• Grâce à l’imagerie cérébrale, Jon Kabat-Zinn et le docteur Richard Davidson, de l’université du Wisconsin, ont montré qu’un entraînement à la méditation se traduisait par un basculement de l’activité cérébrale, de l’hémisphère droit vers le gauche. Or, on sait que l’hémisphère gauche joue un rôle dans la sécrétion d’hormones anti-stress. De plus, ils ont constaté une meilleure réponse immunitaire à un vaccin contre la grippe inoculé pendant l’expérience (10).

• Pour Benjamin Schoendorff, neuropsychologue à l’Inserm : « Le développement de l’attention se caractérise par un épaississement de l’insula (zone située en dessous du cortex préfrontal et impliquée dans la capacité à ressentir et identifier nos émotions). Quant au travail sur l’acceptation, il sollicite le cortex orbito-frontal, impliqué dans la régulation émotionnelle. » Par S.M

On peut ajouter une autre étude montrant que la méditation augmente le taux de mélatonine, hormone liée à de nombreuses fonctions biologiques responsables du maintien de la santé. Massion, AO; Teas, J; Hebert, JR; Wertheimer, MD; Kabat-Zinn, J.  (1995). Meditation, melatonin and breast/prostate cancer: hypothesis and preliminary data. Medical Hypotheses, 44, 39-46. 

 

(1) Reducing risk of recurrence of major depression using Mindfulness-based Cognitive Therapy, Teasdale, Segal, Williams & al., Journal of Consulting and Clinical Psychology, 68, 615-23 (2000).
(2) Three-year follow-up and clinical implications of a mindfulness meditation-based stress reduction intervention in the treatment of anxiety disorders, Miller, Kabat-Zinn et al., General Hospital Psychiatry, 17, 192-200, (1995)
(3) The clinical use of mindfulness meditation for the self-regulation of chronic pain, Kabat-Zinn et al., Journal of Behavioral Medicine, 8 (2), 163-190, (1985) 
(4) The effects of meditation techniques on anxiety and locus of control in juvenile delinquents, CA Flinton, Abstracts International, Section B, The Sciences & Engineering, 59 (2-B): p. 871, (1998)
(5) A randomized, wait-list controlled clinical trial: The effect of a mindfulness meditation-based stress reduction program on mood and symptoms of stress in cancer outpatients, M. Speca et al., Psychosomatic Medicine, 62, 613-622, (2000)
(6)The impact of a meditation-based stress reduction program on fibromyalgia, KH Kaplan et al., General Hospital Psychiatry, 15, 284-289, (1193)
(7) Mindfulness meditation training effects on CD4+ T lymphocytes in HIV-1 infected adults: A small randomized controlled trial, JD Creswell et al., Brain, Behavior, and Immunity 23(2): 184-188, (2009)
(8) What Do We Really Know About Mindfulness-Based Stress Reduction?, Scott Bishop, Psychosomatic Medicine 64:71-83 (2002)
(9) Influence of a mindfulness meditation-based stress reduction intervention on rates of skin clearing in patients with moderate to severe psoriasis undergoing phototherapy (UVB) and photochemotherapy (PUVA), J Kabat-Zinn, E Wheeler & al., Psychosomatic Medicine, 60:625-632 (1998)
(10) Alterations in Brain and Immune Function Produced by Mindfulness meditation, Davidson, Kabat-Zinn & al. Psychosomatic Medicine 65:564–570 (2003)

Qu’en pensent les médecins français ?

Pourquoi sont-ils si peu nombreux à proposer la méditation au sein de leur service ? Comment certains s’y sont-ils pris pour l’imposer ? Témoignages de convaincus et d’un dubitatif.

« Je n’ai eu aucun problème pour installer un programme d’entraînement
à la pleine conscience »
Frédéric Rosenfeld*, psychiatre, Meyzieu (Rhône) :
« La plupart des psychiatres, quand ils ne sont pas trop crispés sur la psychanalyse, me semblent partagés entre doute, curiosité et intérêt pour la méditation. Mais dans le principe, n’importe quelle clinique en France peut installer un programme d’entraînement à la pleine conscience. J’ai même été embauché pour ça ! Depuis un an, cinq sessions ont eu lieu au sein de la clinique psychiatrique où je travaille, dans le cadre de consultations privées. Le programme est remboursé presque pour moitié par la Sécurité Sociale (272 E sur 576 E), le reste dépendant des mutuelles. Nous nous limitons pour l’instant aux personnes ayant traversé au moins trois épisodes dépressifs, car ce sont les plus motivées pour un programme qui demande tout de même une heure de pratique quotidienne. »
* Auteur de « Méditer, c’est se soigner » (Les Arènes, 2007).

« Face aux refus, j’ai renoncé à proposer la méditation à l’hôpital »
Stéphanie Hahusseau*, psychiatre, Toulouse (Haute-Garonne)
« En tant que psychiatre psychothérapeute, je suis en bout de chaîne et je soigne toujours plus de souffrances. Il y aurait tant de choses à faire en amont que cela me frustre ! J'ai proposé à l'hôpital de développer des interventions de médecine intégrative basée sur la pleine conscience, mais les deux services concernés ont refusé. Je ne sais pas auprès de qui faire valoir les économies que permettrait la méditation : directeur des hôpitaux, instances politiques ? Pour l'instant, j'ai renoncé. Je continue d'utiliser la pleine conscience dans ma pratique privée, depuis plusieurs années, en individuel pour faciliter la digestion des émotions négatives ou en groupe pour les douleurs chroniques, les troubles du comportement alimentaire ou les problèmes amoureux. »
* Ses ouvrages (Odile Jacob) : Tristesse, peur, colère : agir sur ses émotions (2006), Comment ne pas se gâcher la vie (2008), Petit guide de l’amour heureux (2009)

« Il ne faudrait pas croire que ça soigne tout »
David Gourion, psychiatre, Paris
« Un nouvel outil thérapeutique ? C'est toujours bienvenu, mais il faut nuancer. Les études concernent peu de cas, elles manquent de suivi et elles sont souvent menées par des adeptes convaincus de l'efficacité. De plus, ces thérapies demandent une grande implication en termes de temps, de coût et de motivation pour les patients. Enfin, il ne faudrait pas croire que la méditation soigne tout, ni qu’elle peut remplacer un traitement médical. La MBCT, par exemple, ne remplacera pas les antidépresseurs - surtout avec seulement une centaine de praticiens suffisamment expérimentés en France. »


                                                                                     Un article pour Psychologies Magazine

 

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