En.marge                                     Le langage de la vie

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Vies en marge
(en construction) 


Dire que la vie possède un langage, c'est déjà lui donner du sens. C'est y chercher un message pour trouver une explication qui pourrait donner une raison d'être à notre existence sur Terre. Ce questionnement est aussi vieux qu'homo sapiens et les réponses sont toujours données en fonction d'un point de vue humain, car la compréhension du langage de la vie ne nous a pas été apportée par des extra-terrestres ou par un dieu descendu du ciel avec son mode d'emploi, mais par des pensées, des observations, des intuitions, des paroles et des écrits tout ce qu'il y a de plus humains. Ainsi personne n'échappe à la règle et la compréhension du langage de la vie dépend d'une époque et de celui qui le décrypte. Ceci est d'ailleurs valable pour toutes nos croyances. Nous sommes condamnés par notre nature à un solipsisme universel, comme le pensaient les philosophes et l'ont démontré les physiciens quantiques. On ne peut pas séparer l'observateur de l'objet observé. Autrement dit, nous voyons tous le monde à travers la paire de lunette de nos sens et de nos croyances. Et chacun le voit à sa manière. Ceci dit, il peut y avoir un consensus autour d'une idée qui finit par devenir vérité d'une époque. Bref, tout cela pour vous signaler, mes frères et mes sœurs, que la description du langage de la vie est reliée à l'évolution des connaissances et de la conscience humaine. Et la paire de lunettes que les hommes portent sur le réel en ce début du troisième millénaire n'échappe pas à la règle. Dans un siècle, les hommes verront certainement les choses autrement, même si les idées de demain sont fruits des visions du présent. Un constat évident qui conduit nécessairement à plus de tolérance et d'humilité. 
Pour bien comprendre les points de vue postmodernes que nous offrent les penseurs, sociologues, scientifiques et philosophes actuels sur le langage de la vie, il nous faut d'abord remonter dans le temps. L'histoire de la pensée humaine est en effet tissée comme une toile et les fils du présent sont enfants des fils du passé, le présent préparant l'avenir. Il est donc important de relier tout cela pour pouvoir dessiner une toile de fond, et sentir dans le présent les prémisses du futur. Car la vision que nous portons sur la vie et son langage est fondamentale, elle détermine notre manière d'être au monde, elle peut bâtir ou détruire des civilisations. 
Pour les premiers hommes, la vie est partout, pas seulement dans les plantes, les animaux et les hommes, mais aussi dans le feu, les pierres, les rivières, les étoiles, le vent, le soleil, la lune... La matière est un Tout vivant, une entité consciente dont les intentions nous dépassent mais avec laquelle on peut communiquer : on la craint, on l'implore, on l'honore. Cet animisme des premiers hommes va se sophistiquer au cours des siècles. La nature sous toutes ces formes va être nommée et dotée d'attributs. Le mécanisme donnera naissance à des divinités représentant avec de plus en plus de sophistication l'environnement physique et psychique de l'homme : dieu serpent, dieu du feu, déesse de la terre, déesse de la fécondité, déesse de l'amour, mythologies multiples qui vont tisser les fils des futures grandes religions. A ce point du récit, il faut nous poser la question de savoir quel est le point de vue actuel de ces dernières sur le langage de la vie, sachant que celui-ci a très peu évolué depuis les temps reculés de leur naissance. Entre parenthèses, il y a quelques années, le point de vue des religions sur la nature de la vie ne m'aurait guère préoccupée, celui de la science me semblant avoir pris le dessus. Mais la faiblesse du scénario proposé par les scientifiques ne satisfaisant pas la soif de sens des hommes modernes, il est évident que l'on assiste aujourd'hui à un retour en flamme des visions religieuses et qu'il faut en parler.
Descendantes de l'animisme, les religions actuelles nous disent que la vie est une création divine, le souffle de Dieu pour les religions du Livre, les deux souffles yin et yang du tao pour les religions orientales. C'est sur ce souffle surnaturel qu'elles s'appuient pour expliquer la vie. Ce souffle a une intention : la vie qu'il crée a un sens. Elle contient un programme caché, une flèche du temps irréversible allant du feu originel de la création à la pierre, au végétal, à l'animal, jusqu'à l'homme pour que celui-ci devienne un être doté de conscience et de libre arbitre pour pouvoir se perfectionner sur le modèle de leurs dieux. En résumé, les religions pensent que la vie est un don de dieu et qu'elle a un sens. Il est évident que l'explication que donnent aujourd'hui les scientifiques sur ce sujet (l'origine de la vie, son langage, son but ) ne peut pas les satisfaire. Il est donc normal que l'on assiste à un renouveau du courant créationniste, un courant fondamentaliste religieux qui ne cesse de grossir dans toutes les religions et qui prend aujourd'hui la forme du néocréationnisme ou intelligent design. Cette théorie cherche à contrecarrer, à partir d'arguments scientifiques, l'explication officielle de la vie proposée par la majorité des scientifiques, ou néodarwinisme. La vision darwiniste peut se résumer simplement : le langage de la vie n'existe pas, il est écrit a posteriori par l'esprit humain qui regarde les êtres vivants, eux-mêmes fruits du hasard et de la nécessité. Pour les néodarwiniens, la vie commence par une soupe primitive où se combinent, au hasard des associations de combinaisons chimiques, des molécules qui vont perdurer parce qu'elles sont compatibles avec l'environnement. Sur cette base, la science officielle trouve normal de découvrir des systèmes vivants combinant des milliards d'éléments chimiques qui se sont formés au cours de milliards d'années. Le code génétique lui-même, issu du hasard des combinaisons chimiques fructueuses, subit des mutations permanentes. La plupart ne servent à rien (elles sont sur la partie non codée de l'ADN), beaucoup sont néfastes, mais quelques-unes, pensent les néodarwiniens, font gagner le gros lot. Ces mutations bénéfiques et transmissibles permettent aux êtres de s'améliorer et créent de nouvelles espèces sur l'arbre de l'évolution. Ainsi, par exemple, c'est le hasard des mutations génétiques qui a fait que certains homo erectus sont nés avec une colonne vertébrale plus redressée que les autres - ce qui leur a donné un avantage pour voir plus loin dans un environnement changeant de la forêt à la savane. Toute la vie sur Terre est donc le fruit d'un heureux hasard, de la bonne mutation pour le bon environnement. Le sens de la vie, disent les néodarwiniens, nous l'écrivons a posteriori, et il ne veut pas dire grand chose sinon que les plus forts, les plus adaptés, survivent et que la compétition entre les espèces est la loi. Pour les néodarwiniens, croire que l'homme pourrait continuer à évoluer sous la pression du milieu physique ou culturel est une illusion. Et de fait, on n'a pas trouvé de changement significatif dans la taille du cerveau ou la mâchoire des humains depuis les premiers homo sapiens, ni dans leur nature profonde : nous ne sommes pas meilleurs que les hommes de Cro Magnon ! Pour les néodarwinistes, cela s'explique par le fait que l'homme libéré de la pression de l'environnement a transformé le milieu pour l'adapter à sa nature. Si des améliorations surviennent dans sa physiologie ou dans son mental, il les devra un jour aux manipulations génétiques, au clonage ou à des puces bioniques. Le langage de la vie, pour les scientifiques, se lit dans notre patrimoine génétique avec ses quatre bases AGCT et toutes les combinaisons qu'elles permettent. La vie n'ayant pas de sens ni d'intention, on peut la considérer comme une grosse machine que l'on peut améliorer au gré de nos envies et besoins.
Voici, rièvement résumées les deux visions qui s'opposent aujourd'hui sur le langage de la vie. Personnellement, je me bats depuis des années contre le modèle darwinien qui possède beaucoup de failles à mes yeux. Le néodarwinisme n'explique pas, en effet, les coévolutions entre deux espèces, et on ne retrouve aucun vestige des mutations. Quand on étudie les bactéries, qui sont les briques élémentaires de la vie, on voit une grande intelligence à l'œuvre. La coopération, plus que la compétition, sert de moteur à l'évolution. Ce sont notamment des associations symbiotiques qui sont à l'origine des mutations génétiques. Lorsque l'on observe la rapidité avec laquelle ces organismes peuvent muter et trouver des parades aux antibiotiques, en échangeant à bon escient des plasmides (des morceaux de leur patrimoine génétique), on se dit que tout cela ne doit rien au hasard... De plus, cette théorie, par le biais du darwinisme social, est mortifère pour l'humanité. Sous prétexte de loi naturelle, elle justifie la compétition entre les hommes et la loi du plus fort. Mais je ne peux non plus souscrire au courant créationniste, car les créationnistes prennent la Bible ou le Coran à la lettre et les néocréationnistes, même s'ils ont des arguments plus intelligents, se battent pour le retour des religions traditionnelles. 
Finalement on pourrait se dire, comme Lewis Carroll, que "si la vie n'a pas de sens, rien ne nous empêche d'en trouver un". Mais lequel ? Ici je reprendrai les arguments du philosophe autrichien Paul Diel qui explique dans son ouvrage majeur Psychologie de la motivation, en s'appuyant justement sur l'observation des êtres unicellulaires, que le langage de la vie est très simple : la vie veut vivre et vivre de mieux en mieux. Vivre de mieux en mieux... une aspiration que nous portons toujours en nous, mais que nous semblons incapables de mettre en oeuvre à l'échelle personnelle et collective. Quand nous ne nous faisons pas mutuellement la guerre, nous nous plongeons dans le développement, un mot qui recouvre quête de biens de consommation et de loisirs, pillage et pollution de la terre, lutte entre les hommes et vide existentiel. Ce mode de vie conduit à une nouvelle page de l'histoire humaine. Car de nombreux signes indiquent que l'ère des catastrophes écologiques a commencé et la nature que les darwiniens ont trop vite voulu sortir de notre histoire va reprendre ses droits. Les hommes qui survivront à ces changements climatiques auront-ils subi une mutation génétique ? Seront-ils des êtres spirituels ou simplement les plus riches de la planète, capables de se payer les derniers lieux agréables, une ville ou une maison bulle, des implants ou des soins de santé génétiques ? Pour un honnète homme, pensant comme les religions que l'homme et l'humanité sont perfectibles, la question ne se pose pas. Hasard ou pas, la vie est une pâte que nous devons modeler pour mieux vivre à l'échelle personnelle et collective. Ainsi, même si le bateau coule, nous nous devons d'écoper par simple élégance naturelle. Le reste n'a pas grande importance. 
En.marge/elle

 

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