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On nomme art musulman ou
islamique la production artistique des pays musulmans dans le monde méditerranéen
et le Moyen-Orient, c’est-à-dire de l'Inde jusqu'à la péninsule
Ibérique, en passant par l’Afrique du Nord. Cet art fut actif pendant
plus d’un millénaire : du VIIe siècle
(quand Mahomet fonde l’islam) au début du XIXe siècle. Il inclut de nombreux domaines :
architecture, miniature, céramique, métal, verre, ivoire, tapis, tissus
et, dans une moindre mesure, sculpture et peinture, et manifeste de
multiples tendances, mais les productions se situent toujours à
l'intérieur d'un cadre unitaire. caractéristiques générales L'architecture et les arts décoratifs
prédominent la sculpture et la peinture. En effet, l’islam interdit
presque totalement la reproduction de figures humaines et animales dans
les arts majeurs, et les relègue dans les arts mineurs. Pour cette
raison, la décoration, très abondante dans les édifices musulmans, se
réduit à des motifs géométriques, végétaux et calligraphiques, ces
derniers en relation avec le Coran. L'abondance des ornements constitue un autre
trait distinctif de l'art islamique, surtout de son architecture, dans
laquelle abondent les motifs végétaux stylisés, les plâtreries
(plaques de plâtres décorées de motifs géométriques), les entrelacs
(enlacement de nœuds), les mozarabes
(petits prismes de bois ou de plâtre disposés à la manière de
stalactites), les inscriptions
qui reproduisent les phrases du Coran avec des caractères coufiques ou
nashi, les stucs, les réseaux
de losanges
et autres figures géométriques en relief, les arcs
aveugles, la céramique
vitrifiée et les azulejos,
qui recouvrent habituellement les soubassements des habitations et les
parois des bains. Ces motifs envahissent les murs et les toits des
édifices et laissent peu d’espace libre. Ils donnent une sensation de
luxe et de splendeur très représentative de l'art islamique. Il faut
aussi mettre en lumière la grande importance octroyée à l'eau et aux
jardins, qui se manifeste surtout par la présence de fontaines ou de
canaux d'irrigation dans la majorité des édifices. En ce sens, il ne
faut pas oublier que, pour les musulmans, le jardin est une reproduction
terrestre du paradis auquel ils aspirent. l'architecture Aussi bien par ses formes que par ses
matériaux (fondamentalement la brique crue et cuite, le bois et le
plâtre), l'architecture islamique est sobrement fonctionnelle. On ne
cherche ni les solutions architecturales audacieuses ni les éléments
spectaculaires. En général, l’édifice, aux formes cubiques a une
faible hauteur ; occasionnellement, une ou plusieurs coupoles le
surmontent. L'unique luxe réside dans la décoration et dans les jardins. Ce modèle, caractérisé par l'emploi d'arcs
en fer à cheval, mixtilignes
ou polylobés et de
voûtes à croisées
d'ogives ou avec
des godrons,
caractérise tous les édifices musulmans : la mosquée, le palais et
le mausolée. La
mosquée La mosquée, née de la prescription
coranique de la prière en commun, est presque toujours composée d'un
patio, d'une tour et d'une grande salle de prière. Le patio (shan)
est une enceinte découverte qu’entourent des arcatures. Au centre, se
trouve habituellement une fontaine, servant aux ablutions rituelles,
parfois couverte par un temple. La tour, appelée minaret,
est destinée au muezzin qui est chargé de convoquer les fidèles à la
prière. Elle peut être unique, ou non, ronde ou carrée. La salle de
prière, enceinte principale de la mosquée, normalement de grandes
dimensions, est presque toujours divisée en différentes nefs par des
rangées de colonnes ou de piliers. Toutes les nefs se dirigent vers la qibla,
le mur terminal orienté vers La Mecque, au centre duquel s'ouvre le mihrab,
une sorte de niche sacrée ornée avec profusion. Devant le mihrab
se trouve parfois la maqsura,
qui est une enceinte fermée destinée au calife, à l'imam ou aux femmes.
Un autre élément de choix est le mimbar,
chaire qui se trouve généralement contre la maqsura. Palais
et mausolées Le palais islamique est généralement un
édifice fortifié composé de trois enceintes de faible hauteur, qui se
structurent chacune autour de patios, dans lesquels se trouvent
habituellement une fontaine ou des canaux d'irrigation. La première
enceinte est réservée au corps de garde et aux gouvernants. La seconde
est destinée aux grandes réceptions du souverain, c'est pourquoi elle
héberge la salle du trône et le salon des ambassadeurs. La troisième
enceinte contient les pièces privées du monarque et de ses familiers. Le mausolée islamique, qui avait
initialement un plan polygonal ou circulaire, finit par adopter un modèle
carré recouvert d'une grande coupole, généralement en forme de bulbe et
très décorée à l'extérieur. Autres
constructions Les autres édifices caractéristiques sont
le caravansérail,
destiné à l'hébergement des caravanes, la madrasa,
ou école d'enseignement religieux, et les enceintes des bains
publics (le hammam),
construits sur le modèle des bains romains, mais de taille beaucoup plus
petite. diffusion de l'art islamique Espagne
et nord de l'Afrique Dans la péninsule Ibérique envahie par les
musulmans en 711, l'art islamique est inexistant avant le règne de
l'Omeyyade Abd al-Rahman Ier.
Ce fut lui qui fonda l'émirat
de Cordoue et qui décida la construction de la somptueuse mosquée
de Cordoue, agrandie ensuite par Abd al-Rahman II (833-848) et Al-Hakam II
(961-976). Dans cet édifice apparaissent déjà les traits typiques de
l'art islamique occidental, qui se manifestèrent de nouveau dans toute
leur splendeur dans le palais de Medina-Azara (vers 936) qu'Abd al-Rahman
III ordonna de construire dans les environs de Cordoue. Après la chute du
califat de Cordoue (1031), la zone musulmane de la péninsule Ibérique
demeura divisée en une série de royaumes indépendants, appelés royaumes
des taïfas, qui sur le plan artistique réalisèrent quelques
créations admirables comme le palais de l'Aljafería à Saragosse et les
forteresses de Cordoue, Grenade et Almería. La faiblesse des taïfas
favorisa l'invasion des Berbères almoravides,
provenant d'Afrique du Nord. On leur doit le château de Monteagudo
(Murcie) et, dans leur terre d'origine, le caravansérail de Fez et les
mosquées de Marrakech (Maroc) et Tlemcen (Algérie), cette dernière
étant inspirée de celle de Cordoue. Au XIIe
siècle, la péninsule fut de nouveau envahie, cette fois par les
Berbères almohades,
qui apportèrent une architecture sobre et monumentale. La mosquée de
Séville constitue un bon exemple ; on en conserve le patio et le
minaret (la célèbre Giralda). On doit aussi aux Almohades la Torre del Oro
de Séville et les mosquées de Hassan à Rabat et de Kutubiya à
Marrakech, qui font partie des œuvres maîtresses de l'architecture
islamique. De la désintégration de l'Empire almohade naquit au XIIIe siècle le royaume
nazari de Grenade,
qui donna le jour à l'un des chefs-d'œuvre de l'art islamique : le
palais-forteresse de l'Alhambra, construit en plusieurs étapes, dans
lequel apparaissent tous les motifs ornementaux de la plastique musulmane.
On doit aussi aux Nazaris le palais du Generalife et ses beaux jardins.
D'autres royaumes apparurent après l'effondrement almohade et laissèrent
aussi leur trace dans l'histoire de l'art : les Hafsides de Tunis,
auxquels on doit la mosquée de la Casbah (1223), et les Abd-al-wadis de
Tlemcen, auteurs du splendide oratoire de Sidi-bel-Hasan (1296). Syrie
et Palestine L'art islamique débuta en Syrie et en
Palestine sous la première dynastie des Omeyyades
(661-750). Cette époque produisit des édifices particulièrement
emblématiques tels que la coupole du Rocher (669-692), décorée de
mosaïques à la manière byzantine, et la mosquée d’al-Aqsa (705),
toutes deux à Jérusalem, ainsi que la Grande Mosquée de Damas
(706-715), qui fut la première mosquée monumentale et fournit un modèle
très imité par la suite, surtout en Occident. Les châteaux, dits du
désert, remontent aussi à cette période ; ils furent construits
par les califes de Damas
aux confins du désert de Syrie. Les plus connus sont ceux de Mshatta
(743), celui de Qusayr Amra, célèbre pour ses bains grandioses, et celui
de Qasr al-Hayr (728), un des rares édifices du monde islamique décoré
de peintures figuratives. Simultanément, en Afrique du Nord, où s'était
déjà diffusée la religion musulmane, on commençait la construction de
la grande mosquée de Kairouan (Tunisie), achevée par les émirs
aghlabites au IXe siècle. Irak Au milieu du VIIIe siècle, lorsque les Abbassides
succédèrent aux Omeyyades, le centre artistique du monde musulman se
déplaça de Damas à Bagdad, de sorte que l'art perse sassanide
influença l'art islamique. Pendant cette période, comprise entre 750 et
900, les mosquées se dotèrent de nefs perpendiculaires à la qibla,
et une décoration intérieure à base de stucs remplaça les mosaïques
et les revêtements de marbre. Les monuments les plus représentatifs sont
conservés à Samarra, ville située, sur le Tigre, à environ 100 km
au nord de Bagdad et où résidèrent les califes de 838 à 889. Deux
mosquées sont à retenir, celle de Samarra et celle d'Abu Dulaf,
construites toutes deux en brique crue ; une grande muraille comporte
des renforts semi-circulaires et le minaret cylindrique a une rampe
d'accès hélicoïdale. L'architecture civile trouve son aboutissement
dans le palais de Yawsaq (836), où apparaît pour la première fois l'iwan
(salle couverte par une voûte en berceau et ouverte sur
l'extérieur par l'intermédiaire d'un portique), appelé à jouer un
grand rôle dans le développement postérieur de l'architecture
islamique. L'artisanat du cuivre et du bronze, ainsi que la production de
riches tissus et d’une faïence aux reflets métalliques, s'épanouirent
aussi durant la période abbasside. Hors d'Irak, la plus belle
construction de cette période fut la mosquée égyptienne de Ibn Tulun
(879), inspirée des monuments de Samarra. Égypte L'art musulman s'affirma en Égypte pendant
l'époque fatimide (913-1171), unissant les influences orientales et
d'Afrique du Nord. Le Caire, enrichi alors par les nombreux palais
aujourd’hui disparus, conserve les mosquées de al-Hakim (900-1003) et
de al-Azhar (970-972). Les Fatimides
se distinguèrent aussi dans la construction de fortifications ;
trois portes monumentales donnent aujourd’hui une idée de la muraille
du Caire. Les arts mineurs connurent aussi un grand développement, en
particulier la faïence, le verre, le bronze, la taille sur bois et les
tissus, caractérisés par ce que l'on appelle le point de Tiraz. Saladin
et les Ayyoubites
mirent fin en 1171 au royaume fatimide. Sous les Ayyoubites, qui
gouvernèrent jusqu'en 1250, apparut le prototype architectural de la
madrasa, qui consiste en un patio et quatre iwans. Les Mamelouks,
qui gouvernèrent l’Égypte et la Syrie de 1250 à 1517, imposèrent un
style architectural raffiné et précieux, caractérisé par une
élégante décoration polychrome, des minarets munis de balcons et
d’arcs en fer à cheval, en ogive. Ce courant se concrétisa dans une
multitude d'édifices, parmi lesquels il faut mentionner la monumentale
mosquée-madrasa de Hassan (1356) et la mosquée cairote de Qa'it bey
(1472), qui comporte la tombe des califes. Les
Turcs séleucides Les Séleucides, qui dominèrent l'Iran,
l'Irak et la Syrie du XIe au XIIIe
siècle, donnèrent aux arts une forte impulsion, qui se manifesta par de
nouvelles formes architecturales, comme la tour funéraire et le
mausolée ; coupoles et lanternes ornèrent les nefs des mosquées,
qui, plus élevées, donnèrent plus de volume à l’espace intérieur.
Des constructions monumentales comme la Grande Mosquée d'Ispahan et les
mosquées d'Al-Musil et d'Alep datent de cette époque. Perse Après la conquête du Turkestan, de l'Iran
et de l'Irak par les Mongols,
l'art islamique s’imprégna d'éléments esthétiques provenant de la
culture chinoise, surtout dans les arts mineurs. En architecture, la
grande innovation de cette période (1250-1500) fut l'apparition d'un iwan
sur chacun des quatre côtés des patios de la mosquée. La construction
de tombes atteignit avec les Mongols son plus haut niveau, comme le
montrent le mausolée de Ulyayiu à Sultaniyeh (1309), l'un des plus beaux
monuments d'Iran, et la tombe de Tamerlan à Samarcande (1504), dont la
belle coupole en forme de bulbe est décorée de céramique vitrifiée. La
production de miniatures, née auparavant, atteignit alors une
incomparable splendeur dans les écoles de Tabriz, Herat et Boukhara. Les
manuscrits, d'une grande force expressive, offrent un puissant témoignage
de la vie publique et privée dans un style brillant et plein de couleurs.
L'apogée de la miniature
persane se poursuivit pendant l'époque des Séfévides
(1500-1736), auxquels on doit de spectaculaires monuments architecturaux
revêtus de céramique, notamment la madrasa de la Mère du roi à
Ispahan. Les tapisseries des Séfévides sont elles aussi remarquables. Turquie L'architecture islamique suivit une
évolution très singulière avec les Turcs ottomans,
surtout à partir de la chute de Constantinople en 1453. Un architecte
génial, Sinan (1489-1578), généralisa un schéma de mosquée inspiré
de la basilique byzantine de Sainte-Sophie : une grande coupole
centrale est entourée de coupoles médianes et de divers minarets pourvus
de balcons, ce qui confère à l'ensemble un plus grand développement
vertical et crée un jeu spectaculaire entre les volumes. Ce modèle
atteignit son apogée, à Istanbul, avec la mosquée de Suleymaniye (1550)
et la mosquée Bleue. Les disciples de Sinan étendirent le style de leur
maître à l’Afrique du Nord : mosquées de la Pêcherie (1660,
Algérie), de Sidi Mahrès (1675, Tunis) et de Mehmet Ali, un peu plus
tardive, au Caire. |
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