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Le
XVIIIe
siècle commença avec les monarchies absolues et se termina par la Révolution
française. La montée de la bourgeoisie opposa les goûts artistiques de
celle-ci à ceux de la cour et de la noblesse. Aussi, deux pôles ont-ils
coexisté : le rococo, un art aristocratique et courtisan, plein de
fantaisie et de raffinement ; le néo-classicisme, plus en accord
avec la nouvelle société bourgeoise, qui prônait ordre, clarté et
raison. Le
rococo Le
style rococo naquit en France, durant la régence du duc d'Orléans, et se
développa sous le règne de Louis XV. Il se dressait contre le baroque et
contre l’académisme. Face au faste et à la solennité de la cour
versaillaise, le rococo proposa un art plus humain, des atmosphères
intimistes et remplies de la grâce et de la beauté courtisanes. Ce fut
un art fondamentalement ornemental, dans lequel primait le caractère décoratif
sur l'organisation de l'espace et sa structuration. Le motif décoratif
qui caractérisait le nouveau style était la rocaille,
un élément asymétrique, à l'aspect d'un coquillage, qui donna son nom
au mouvement. France L'aristocratie
abandonna les grands palais et s'installa dans des hôtels urbains, entourés
de jardins et aux intérieurs cossus, dans lesquels se succédaient les
petites pièces de séjour, les salons et les cabinets. On décorait
chaque salle selon l'usage que l'on en faisait, qu'il s'agisse d'un
bureau, d'une chambre ou d'un boudoir, avec de la marqueterie, des
fresques, du stuc, des porcelaines, des tapisseries et des chinoiseries,
pour créer une ambiance sensuelle, raffinée et élégante. Les
représentants les plus brillants de l'architecture rococo furent
l’architecte Jacques
Ange Gabriel (1698-1782), l’auteur du Petit Trianon (1762-1768),
à Versailles, et les décorateurs Oppenord et Meissonnier. Mais Gabriel,
architecte de génie, ne se cantona pas au rococo, comme le prouvent la
place de la Concorde et l’École militaire, à Paris. Les
arts mineurs et décoratifs prirent avec le nouveau style une importance
singulière, et la peinture de cette époque cultiva une thématique
galante propre à une société frivole et sensuelle. Les principaux représentants
de la peinture des fêtes
galantes furent Antoine
Watteau (1684-1721), avec ses scènes champêtres et musicales se déroulant
dans des ambiances bucoliques et idylliques, rendues par des traits de
pinceau vaporeux et comme dissous, François
Boucher (1703-1770), avec une peinture plus sensuelle, représentant
en général des femmes nues et des scènes sophistiquées et délicates,
et Jean
Honoré Fragonard (1732-1806). Parallèlement surgit un courant réaliste
et intimiste, illustré avec génie par Jean-Baptiste
Chardin (1699-1779), avec talent par Maurice Quentin de La Tour
(1704-1788) et sur un ton moralisateur, par Jean-Baptiste Greuze
(1725-1805). Le reste de l'Europe Hors
de France, l'influence du rococo se fit sentir avec une intensité
variable, mais finit par s'imposer dans les petites cours européennes. La
Bavière et les États allemands allaient être les meilleurs représentants
de ce courant, avec leurs palais, leurs jardins aux singuliers jeux d'eau,
leurs escaliers, leurs balustrades et leurs intérieurs décorés d'une
profusion de stucs et de fresques créant une atmosphère vibrante, pleine
de lumière et de couleurs. L'intérieur des églises allait aussi être
l'objet d'une abondante décoration en stucs et en dorures, contribuant à
la disparition des murs dans la lumière et la couleur. En Bavière, François
de Cuvilliés
décora le palais de Nymphenburg et dessina son parc (avec le pavillon d'Amalienburg),
ainsi que le théâtre de la Residenz de Munich. En Prusse Georg
von Knobelsdorff (1699-1753), construisit l’Opéra de Berlin
(1741-1743) et, à Potsdam, le château de Sans-Souci (1745-1747), inspiré
du Trianon de Versailles. D'autres artistes acquirent alors de
l'importance : Johann
Baltasar Neumann
(1687-1753) créa certaines des œuvres les plus belles du baroque
allemand, comme la résidence de l'Électeur de Würzburg (1720-1750), décorée
de fresques de Tiepolo, et l'église de Vierzehnheiligen ; Dominijus
Zimmermann
fut l'auteur du sanctuaire de Wies ; les frères Asam
et Johann Michael Fischer
réalisèrent de magnifiques sanctuaires, comme l'église d'Ottobeuren. La
peinture rococo fut dominée par l'école napolitaine, avec Francesco
Solimena et ses disciples, Giaquinto et Jacopo Amignoni, et par l'école vénitienne,
avec Giambattista
Tiepolo (1696-1770), génial représentant de la tradition décorative,
auteur de fresques pleines de raccourcis et vibrantes par leur
chromatisme. Dans cette période apparurent aussi les grands auteurs vénitiens
des vues splendides sur la ville des canaux, Antonio
Canaletto
(1697-1768) (auteur d’innombrables vedute)
et Francesco
Guardi (1712-1793). En Angleterre, le portrait triompha, avec William
Hogarth (1697-1764), spécialiste du portrait satirique et
moralisateur, Joshua
Reynolds, Thomas
Gainsborough et Thomas
Lawrence, les portraitistes préférés de l'aristocratie anglaise. En
Espagne, l'arrivée de la dynastie des Bourbons allait entraîner un
changement dans la vie artistique espagnole, très liée jusque-là au modèle
français et au classicisme. Les artistes espagnols, comme Luis Paret y
Alcázar ou les frères Bayeu durent adopter le nouveau style pour
respecter les commandes que leur faisaient les courtisans. Dans le champ
architectural, il faut mettre en avant la construction du nouveau Palais
Royal de Madrid, dont fut chargé Filippo
Juvara, et le début de la construction de Palais de la Granja, par
Theodoro
Ardemans.
le
nÉo-classicisme Au
milieu du XVIIIe
siècle, l’attrait pour le style rococo déclina. Parallèlement, se développa
un courant qui se plaçait sous le signe de la rationalité, et
s'inspirait des modèles esthétiques et moraux de la Grèce et de la Rome
républicaine. Les découvertes archéologiques de Pompéi et d’Herculanum
contribuèrent à cela, de même que les textes théoriques des Allemands
J. J. Winckelman et Lessing (1729-1781), auteur de Laocoon
(1766). Si le néo-classicisme eut son berceau en Italie, ce fut en France
qu'il se développa le plus profondément, et il occupa la période de la
Révolution française et celle de l'Empire napoléonien. L'esthétique
rationaliste et néo-classique devint le langage adéquat pour la nouvelle
bourgeoisie intellectualisée, bien qu'elle finît par servir le régime
impérial fondé par Napoléon. L'architecture Il
exista dans le domaine architectural deux interprétations du classicisme,
une architecture qui appartenait toujours au baroque dans sa conception,
par son exaltation du pouvoir et de la grandeur mais qui, en réaction
contre le rococo, se caractérisa par sa simplicité décorative, et une
architecture “ de la raison ”. Cette
première architecture
d'inspiration classique, pleine de grandeur et de monumentalité,
allait prôner des murs dénudés et blancs, prenant pour modèles le
temple grec et les ordres dorique et ionique, et empruntant à l’art
romain la conception spatiale, la coupole, l'arc de triomphe et la colonne
commémorative. Tout cela se traduisit dans des constructions au plan
parfaitement régulier, dans lequel dominaient la ligne horizontale, le
marbre blanc et l'absence de contrastes chromatiques. Parmi les exemples
les plus représentatifs se trouvent le Panthéon de Paris (alors église
Sainte-Geneviève), dont Soufflot dirigea la construction de 1755 à 1780,
les œuvres de Robert
Adam (1728-1792) et de ses frères en Angleterre, le Capitole de
Washington, et la Glyptothèque de Munich, conçue par Leo
von Klenze (1784-1864). En Espagne, cette tendance se concrétisa
par le rejet radical des excès du style des Churriguera, et suivit l'austérité
des ingénieurs militaires. Opposée au néo-classicisme, l’architecture
de la raison, innovatrice et visionnaire, est centrée en France
sur les figures de Claude
Nicolas Ledoux (1736-1806), architecte maudit dont les trop rares réalisations
annoncèrent le fonctionalisme moderne, et d'Étienne
Louis Boullée (1728-1799), et, en Angleterre, sur celle de Joan
Soane. Au
milieu du XVIIIe
siècle, parallèlement au courant néo-classique, surgirent en Angleterre
différents courants qui, allant de pair avec l'affirmation des
nationalismes dans toute l'Europe, reprirent des éléments formels aux
styles médiévaux, et principalement au style gothique, ainsi que des éléments
d'architectures plus exotiques, comme l'architecture indienne ou
islamique. On retiendra dans ce domaine les œuvres de Walpole, comme la
maison de Strawberry Hill, de James Wyatt et de John Nash, au style néo-indien. La sculpture Dans
la seconde moitié du XVIIIe
siècle, les sculpteurs reprirent les modèles gréco-romains pour se libérer
de la tradition baroque. Le résultat fut une statuaire un peu froide et
un peu académique, aux figures idéalisées et souvent inexpressives,
disposées en des ensembles sobres et à l'aspect tranquille, marqués par
la primauté de la ligne, les finitions en marbre poli. Les thèmes que
l'on rencontre le plus habituellement sont des allégories, des portraits,
des scènes mythologiques, des monuments funéraires avec reproduction de
buste, et des nombreux bas-reliefs pour les intérieurs et pour les
monuments comme les obélisques et les arcs de triomphe. Les artistes les
plus représentatifs en ce domaine furent Antonio
Canova (1757-1822), Bertel Thorwaldsen, Johan Gottfried Schadow,
John Flaxman et les espagnols Damià campeny, Juan Adán et Antonio Solà. La peinture Les
peintres néo-classiques cherchèrent leur inspiration dans l'Antiquité,
à travers une thématique héroïque et pleine de grandeur. Les
portraits, les thèmes mythologiques et de la peinture historique, ainsi
que les faits contemporains trouvèrent leur expression dans des œuvres
caractérisées par la clarté de leur composition, la netteté des
contours et des volumes, et un chromatisme froid. La
peinture néo-classique devait atteindre son point culminant dans les œuvres
des Français Louis
David
(1748-1825) (le
Serment des Horaces, la Mort de Marat), d'Antoine
Gros (1771-1835) (les
Pestiférés de Jaffa), Dominique
Ingres (1780-1867) (la Grande
Odalisque) et de l’Allemand Anton
Raphael Mengs. En Espagne, il convient de souligner les apports de
José de Madrazo, Vicente López et des disciples de Mengs, Mariano
Salvador Maella et Francisco Bayeu. Le génial Francisco
de Goya (1746-1828) fut contemporain de David et de Canova ;
cet artiste singulier dépassa les influences baroques et néo-classiques
dans une œuvre extraordinairement personnelle, qui préfigurait les révolutions
artistiques du XIXe
(Manet) et du XXe
siècle. Son œuvre, extrèmement variée, atteint aussi bien à
l’exquis raffinement qu’à un expressionnisme terrifiant (par exemple
dans les eaux-fortes des Désastres
de la Guerre, 1810-1814). |
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