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Giorgio Thurn

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Souvenirs, souvenirs...
Dans la presqu’île de mon enfance, le Père Guillo était connu pour « trouver l’eau ». Quiconque voulait creuser un puits faisait d’abord appel à lui.
Les doigts serrés sur les branches de sa baguette en Y, il arpentait le champ dans tous les sens, agité parfois d’un curieux mouvement des bras qui lui tournait verticalement les mains. Il s’arrêtait, repartait, revenait, marchant ainsi jusqu’à se camper en un point et déclarer fermement : « Elle est ici ». Prenant alors une vieille montre de gousset, il la tenait d’une main au bout de sa chaîne, tandis que son aide (toujours sa femme ou sa fille) déposait dans son autre main des cailloux pour indiquer la profondeur à laquelle il faudrait creuser. Nombre de puits témoignaient de sa compétence, mais comment savait-il ? Il se contentait de mentionner un « don » transmis par son grand père, en même temps que la montre.
Nourri de tels souvenirs, c’est donc sans scepticisme que j’assistai, des décennies plus tard mais sur ces mêmes terres de Bretagne, à un séminaire de géomancie proposé par l’architecte autrichien Giorgio Thurn. Comme le sourcier, le géomancien (du grec , terre et manteia, divination) ne cherche-t-il à deviner ce qui circule sous terre ou se trame en un lieu ? Qu’importe si cet art très ancien – ce feng shui à l’occidentale – porte aujourd’hui le nom de géobiologie ou de radiesthésie terrestre ? Il s’agit bien toujours de définir, par intuition, la qualité d’un lieu. Et que l’on attribue cette qualité à l’influence du magnétisme, comme aujourd’hui, ou comme hier à la rencontre des forces du Ciel et de la Terre (un cosmo-tellurisme par ailleurs bien réel, voir plus bas); on fait appel aux mêmes outils, baguettes et pendules, et aux mêmes perceptions que le sourcier cherchant l’eau.
Mais ce don, d’où vient-il ? D’un instinct ancestral, comparable à celui qui conduit les animaux à pressentir les tremblements de terre ou à préférer certains lieux (voir plus bas) ? Peut-être, mais pour moi, seules certaines familles comme celle du Père Guillo en avaient assuré la transmission. Et voilà que Giorgio Thurn, les géobiologues présents au séminaire et tous ceux que j’interrogeai par la suite m’assuraient que cet instinct, nous l’avons tous un peu en nous et pouvons le développer ! Un peu, en effet : dans mes mains la baguette est restée muette, mais les tiges coudées de cuivre, entre mes doigts, ont bel et bien tourné en certains points du terrain d’exercice !

Carnac et mégalithes
Je n’étais pas au bout de mes surprises. Car l’occasion se présentait de visiter avec un nouveau regard les alignements de Carnac, et d’en découvrir une explication qui ne manqua pas de m ’étonner. Oublions, bien sûr, Obélix et son menhir ! L’homme a dressé des menhirs vers le ciel et bâti des dolmens longtemps avant les Celtes, même si ces mots furent forgés au XVIIIè siècle à partir du breton (men : pierre, hir : grosse, d(t)ol : table). Mais savez-vous à quel point il l’a fait ? De l’Ethiopie 10 000 ans avant notre ère, à l’Egypte (8 000 ans) ou l’Inde (3 000 ans), de l’Indonésie au Brésil, on trouve des pierres levées partout – la Corée en compte près de 90 000. Quant aux explications des archéologues, toutes ont leur part de vérité… et quelque chose qui cloche ! Sites funéraires ? Oui, mais les dolmens ne recouvrent pas tous des tombes et les menhirs, rarement. Lieux de rites solaires ? Certes, l’érection de mégalithes correspond à l’avènement de l’agriculture, quand il fallut prier le ciel d’être clément. Mais les cromlechs, ces cercles de pierres que l’on retrouve également partout, construits aux mêmes époques, ne suffisaient-ils pas ? Et les menhirs isolés, à quoi donc servaient-ils ?
Autant de questions que se pose l’archéologie, autant de failles par lesquelles s’engouffrent des explications farfelues, allant du balisage pour OVNI aux vestiges de la civilisation atlante. Loin d’être aussi loufoque, celle que propose la géomancie ne s’oppose pas aux thèses officielles et répond en partie aux questions en suspens. S’appuyant sur leur perception des courants telluriques – voire sur leur intuition des interactions entre ces courants et l’énergie cosmique –, nombre de géomanciens, géobiologues et radiesthésistes défendent en effet que nos lointains ancêtres, forts de cet instinct qui nous habite tous, avaient tenu à marquer de pierres les lieux qu’une conjonction de ces forces avait rendu « spéciaux ». Ainsi, dit Giorgio Thurn, « comme un être humain, la Terre est parcourue de méridiens, de lignes de force au croisement desquelles peuvent se créer de 'hauts lieux' ou, à l’opposé, des lieux néfastes pour la santé. Peut-être les Anciens se livraient-ils à une acupuncture de la Terre, soignant ici, corrigeant là ? » On rejoint là les maîtres du Feng Shui, qui usaient d’un idéogramme commun (xué) pour désigner les points d’acupuncture et les endroits de la surface terrestre où l’énergie cosmique (chi) à la fois converge et émerge. Ou la tradition des druides, et sa « vouivre » qui court sous nos pieds et dont parle Le Pape des Escargots, roman d’Henri Vincenot. Mais on découvre, surtout, la clé de l’éternelle ambition géomantique : non seulement percevoir, mais aussi corriger.

Des forces bien réelles
Les forces cosmiques et telluriques existent. Les premières sont les ondes électromagnétiques et les particules qui nous viennent du soleil et des étoiles, et les secondes, le champ magnétique terrestre qui les bloque partiellement. Généré par le noyau de fer liquide entourant la graine centrale de la Terre, selon la théorie qui prévaut actuellement, ce champ a déjà varié plusieurs fois au cours des temps. Son intensité faiblit depuis 100 ans, tandis que la vitesse du déplacement de son axe par rapport aux pôles géographiques s’est accélérée. A partir de l’orientation des particules magnétiques des roches anciennes, les chercheurs ont constaté que cette double évolution avait conduit par le passé – plus de 300 fois - à une inversion des pôles. La dernière est survenue il y a 780 000 ans, du temps d’homo erectus. Si la vie ne semble pas en avoir souffert alors, nos technologies fondées sur l’électricité ne survivraient pas aujourd’hui à un tel événement.

Un instinct animal ?
Les fourmilières semblent bâties n’importe où – une butte, un creux, une vieille souche, le sol nu – mais elles se trouvent toujours, assurent les géobiologues, en un point favorisé par le tellurisme. Pour les anciens Chinois, l’hibernation d’animaux aussi différents que l’ours (Yang) et la tortue (Yin) ne pouvait s’expliquer, explique le sinologue Cyrille Javary, que par « l’endroit qu’ils choisissaient pour hiberner, parce que l’énergie vitale qui irrigue toute la nature par mille canaux souterrains, y était là plus concentrée et moins profonde. Dans ces points spécifiques du paysage, les hibernants pouvaient compenser le manque d’énergie vitale provoqué par leur jeûne en puisant dans celle qui affleurait dans la cavité qu’ils avaient élue. »* Une étude tchéco-allemande montre aujourd’hui que les cerfs, les chevreuils et même les vaches broutent et se reposent de préférence en s’alignant sur l’axe des pôles magnétiques.** Quant aux chats, ils ne choisissent pas forcément pour dormir le fauteuil le plus ensoleillé et le plus douillet. Choisiraient-ils l’"endroit", eux aussi ?
* 100 mots pour comprendre les Chinois, Cyrille Javary, éd. Albin Michel, 2008
* Magnetic alignment in grazing and resting cattle and deer, Begall, Červený, Neef, Vojtčch & Burda, PNAS vol. 105, n° 36, 9/9/2008, http://tubeaessai.blogs.nouvelobs.com/magnetisme
ou : http://www.pnas.org/content/early/2008/08/22/0803650105.full.pdf+html

Infos diverses
Dans la Bible, le successeur de Moïse, Josué, dresse « une grosse pierre sous le chêne qui était dans le lieu consacré à l’Eternel » et en fait le témoin des engagements que le peuple vient de prendre envers son dieu. (Josué, 24:26).
Ouvrant sur les entrailles de la Mère-Terre, les gouffres et avens représentaient des lieux particulièrement puissants. Dans la Grèce d’avant la période hellénique, encore largement chamanique, on conseillait aux femmes en mal d’enfant de dormir à l’entrée d’une cavité souterraine, sur une peau de bélier. Les temples d’Asclépios, dieu de la médecine, furent construits au-dessus de tels gouffres, tout comme la plateforme sur laquelle la Pythie de Delphes officiait.
Lire : Les Grecs et l’irrationnel, Dodds, éd. Montaigne, 1965

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